mardi 25 mars 2008

La leçon (ratée) de géographie, l'élève aigri et le prof vexé


Bonjour tout le monde,


Aujourd'hui, j'ai vécu un rite de passage supplémentaire de l'enseignant: l'inspection. Mercredi dernier, la proviseur vient gentiment me prévenir que...oh surprise, j'allais être inspecté le 25 mars, et ce, avec ma classe de terminale (mentionnée précédemment dans ce blog). Le moment de totale surprise passée, je me raisonne: depuis trois ans dans le métier, après avoir court-circuité l'IUFM par la fac, il fallait bien que ça arrive. Après une rapide recherche sur le web, je découvre que l'inspectrice est 1) une géographe, 2) une partisane résolue des nouvelles technologies...Votre serviteur se limite au visionnage de quelques vidéos ou DVD et à l'usage du traitement de texte et est surtout férocement historien. Cela signifie que la bivalence forcée que la tradition nous impose ne m'a jamais convaincu ni même séduit. Je fais faire de la géographie aux élèves en essayant de ne pas trop jargonner et en leur faisant passer quelques trucs simples. La subtilité profonde de certains croquis géographiques me laisse de marbre.

Le jeudi, conseil de classe des terminales sans histoire. Tout le monde se félicite du meilleur climat qui règne depuis l'exclusion des 3 lascars sus-mentionnés. Incidemment et sans que j'y pense vraiment, le prof de philo et moi nous opposons au fait que Le Gazier obtiennent des "encouragements". Je dois vous expliquer que notre cour, sans appel, délivre chaque trimestre, des gratifications symboliques sans la moindre conséquence concrète mais qui font plaisir aux élèves: il y a les encouragements (élève-méritant-qui-a-des-difficultés-mais-qui-fait-des-efforts), les compliments (c'est-bien-continue-et-ce-sera-très-bien) et bien sûr, les félicitations (pourquoi-ne-sont-ils-pas-tous-comme-toi)...La règle d'or de la diplomatie scolaire, consiste, lorsqu'un consensus semble se dessiner pour accorder une de ses gratifications, à vérifier, selon la formule consacrée, "qu'aucun collègue ne s'y oppose" (la dite "opposition" est aussi ferme que la position française face aux exactions chinoises au Tibet). Le Gazier (il m'a demandé un jour en classe "mais monsieur, c'est quoi le...gaz naturel?" j'ai compris que pour lui, tout élève de S qu'il était, le lien entre un gisement de gaz naturel au Kazakhstan et la cuisinière au gaz familiale n'était pas du tout clair...) méritait des "encouragements" selon nos collègues de maths & physique...mais franchement avec 3 en philo et 6 en histoire, fallait pas exagérer. Nous avons donc mis notre veto.

Arrive ce matin, 8h, moi, tendu comme un slip de moine, rapport à cette inspection à venir. Le Gazier devant la grille de l'établissement, "Ouais M'sieu, pourquoi VOUS vous êtes opposés aux encouragements pour moi?", et moi "Ecoutez, je ne sais plus, et puis en plus, enfin 6 en histoire quand même..." Bref, sensation d'un juge confronté à un justiciable juste condamné, sensation désagréable d'avoir à justifier une appréciation forcément un peu subjective.

A 15h, un peu pâle, j'accueille Mme l'inspectrice et Mme le proviseur (surprise du chef) dans ma classe. J'ai passé le week end de Pâques à bûcher une leçon de géographie maladroite sur "L'Asie Orientale" et j'ai construit un truc lourd mais bien rempli sur les inégalités régionales qui se termine par ce qui me semble une magnifique "mise en activité" des élèves: une sous partie sur la méthode du croquis géographique à l'épreuve de bac (thème essentiel que j'ai un peu maltraité depuis septembre) avec en illustration évidemment l'Asie Orientale "unité ou diversité?" (appréciez comment l'historien peine à élaborer une problématique géographique). Le cours se passe correctement 20 min, les élèves sont attentifs, j'arrive à faire sourire mes 2 invitées avec de la dérision facile. J'ai très chaud mais je me dis "déjà 20 min!".

Et là Le Gazier, l'air de rien, lève le doigt:
"M'sieu?
-Oui (inconscient du piège qu'on me tend perfidement)?
-Votre Grand 2 là (II) il ne correspond pas avec ce que l'on a déjà écrit dans le cahier, on a déjà un Grand 2 dans le cahier..."
Moi blême, "oui bon, bah, c'est une erreur, c'est un grand 3 (III) et puis c'est tout..."
Eh oui, j'avoue ma turpitude: rédigeant une thèse en parallèle de mon activité de prof de lycée, il m'arrive...d'improviser un peu le cours devant les élèves (surtout de la géo) et donc forcément les titres et le plan ne correspondent pas toujours. Je vois avec horreur Mme l'inspectrice qui inspecte attentivement le cahier de La Bavarde Du Fond et dont les hochements de tête significatifs semblent valider l'acte accusatoire de cette enclume de Gazier. C'est un cauchemar.

Loin de moi l'idée de suggérer que le Gazier est responsable de ma mauvaise prestation. Le cours n'était pas bon, "l'activité de carte" était ratée, ma carte vilaine et pas claire et la "séance" trop chargée pour donner de bons résultats pédagogiques. Ca m'apprendra à improviser (et mal surtout) en géographie alors que des inspectrices géographes attendent au coin du bois. Evidemment le fait que mon collègue Le Barbu Centriste (rapport à sa pilosité faciale et son bayrouisme pénible) ait banni la géographie de son enseignement de 2nde et de 1ère, au mépris des programmes, me laisse un peu sur les fesses.
L'entretien a été un peu pénible. La dame sympathique m'a aligné avec une certaine condescendance "on voit tout de suite que vous êtes historien", traitement que j'avais, il faut le dire bien mérité. ça a commencé par "il existe des stages pour perfectionner votre pédagogie" et ça s'est fini par "vous avez beaucoup à apprendre encore".

Autrement dit une bonne claque dans la gueule. Je suis vexé évidemment. La pensée des supplices que je pourrais imposer au Gazier ne me consolent guère. Va falloir être plus sérieux!

Le prof

PS: niveau contestation, alors que le Recteur sacque 640 postes en septembre prochain, je participe à la grève de l'Académie jeudi. Nos collègues des "dispositifs" Sciences Po nous soutiennent, ça fait plaisir!

mardi 19 février 2008

Le recteur, le braqueur et un conte de la vraie lâcheté





A l'Education Nationale, j'apprécie beaucoup de ne pas avoir de véritable patron, tâtillon, casse-couilles, qui viendrait surveiller chaque jour que j'ai bien fait mon travail. Une fois de tant en tant, il nous est toutefois donné de rencontrer le recteur. Si Darcos est notre Dieu, alors nous autres pauvres créatures du 9-3, mais aussi du 9-4 et du 77, devrions nous prosterner devant cet homme comme devant St Pierre, et mes collègues d'histoire devant cette femme comme devant la Bonne Mère...Evidemment c'est un peu exagéré, mais je suis d'humeur théologique ces temps-ci, peut-être le fait d'avoir terminé le rude cours sur la Réforme avec les Secondes?
Aujourd'hui mardi, au lieu d'aller trimer avec mes collègues au lycée, j'ai eu le droit, vu que j'avais montré un intérêt certain pour la justice, d'aller à un colloque toute la jo
urnée organisée à l'Université de Marne La Vallée. C'était extrêmement intéressant, il y avait nombre de magistrats de Seine St Denis et du Val de Marne aux prises avec des difficultés comparables aux nôtres et tout aussi intéressés par les moyens de faire connaître la justice aux gamins et "former à la citoyenneté"...

Franchement, j'attendais cette opportunité de sortir du lycée. La semaine précédente, une collègue m'avait copieusement insulté...Nous participions tous deux à un "
conseil de vie scolaire" sorte de grande cérémonie de flagellation pour un élève particulièrement désagréable...mais pour lequel nous n'avons assez d'éléments pour le présenter au "conseil de discipline" au cours duquel il risque d'être effectivement éjecté du lycée. Notre client, appelons-le Jojo (c'est clairement un affreux) nous gonfle depuis le début de l'année. Physiquement Jojo est un peu grassouillet, il a 20 ans...en Terminale et redouble. Jojo ne fait rien en classe si ce n'est bavasser avec Pois Chiche ou jouer avec son I-Phone (Jojo a des sous). Jojo perturbe le cours, exaspère les profs de toutes les mgatières et n'a même pas daigné retirer ses livres gracieusement prêtés pour l'année par le CDI. Seulement Jojo n'est pas complètement stupide et il lui arrive d'intervenir intelligemment dans mon cours contrairement à son copain la Teigne (celui qui m'a menacé). Au conseil de vie scolaire, Jojo regarde ses baskets, s'énerve et est d'une mauvaise foi incroyable. Il est venu avec son grand-père et l'on apprend presque fortuitement que Jojo est depuis peu orphelin. Il en prend plein la gueule pendant le tour de table et si nous avions été au 16ème siècle, ma collègue de maths, la plus véhémente, aurait allumé le bûcher dressé par mon collègue de physique.
Parlant en dernier, j'exprime également mon exaspération pour Jojo mais il me prend de modérer mon propos en soulignant à quel point je regrette que notre client soit dans une telle ornière alors que manifestement il aurait pu? pourrait? faire quelque chose de correct de sa "carrière" scolaire. Sur ce, 14h sonne et je quitte la salle avant l'admonestation finale ("faites vous tout petit, sinon..."). A 16h, pause en sall
e des profs, j'exprime à ma collègue de maths ma satisfaction devant la tenue de cette cérémonie; la voici qui plisse les lèvres de mépris et me déclare "franchement, je t'ai trouvé un peu lâche, tu te plains tout le temps de Jojo et alors quand il faut dire ce qu'on en pense, tu te dégonfles". Vous imaginez ma réaction...Au départ, se faire maltraiter par une prof de maths ne réveille jamais chez moi de bon souvenir, mais là, en plus il y a insulte. Je lui réplique qu'elle peut être en désaccord mais que franchement faudrait pas voir à me chercher trop dans les coins avec des mots blessants...Une ambiance délicieuse.

Donc je profitai bien de la journée de colloque. Je ne pensais
plus trop à la grève régionale, et d'un jour, de vendredi, autant dire la grève très conne du SNES que j'avais quand même faite pour protester contre les 640 postes supprimés dans l'Académie à la rentrée 2008, une décision tout à fait assumée par notre grand manitou. Le manitou en question tout de même prêt à ré-embaucher des retraités pour boucher les trous des vacataires que son prédécesseur a jeté comme des malpropres il y a quelques années. Je ne pensais plus trop non plus au merveilleux Michel Foucault et à son analyse de la parresiâ, le "parler-vrai" qui consiste à dire la vérité à un puissant quelles qu'en fussent les conséquences.

A la fin du colloque, le manitou se re-pointe et commence à no
us débiter un grand blabla cosmique, son "projet d'académie" jusqu'en 2011...Un truc mémorable, une symphonie au pipeau! A base de "savoir, solidarité, équité", déclinés en couleur dans le "temps et l'espace" sur un petit dépliant très joli.
Je me dit "Vas-y!", "Dis-le", "Parle-lui des 640 postes"! J'aurais aimé avoir les cojones de me lever devant 200 personnes et gueuler un truc du style "Monsieur le Recteur comment allons nous mettre
en oeuvre ce merveilleux projet avec 640 postes en moins dès la rentrée prochaine?" ça ça aurait été une belle parresiâ, un truc à réveiller Michel!

J'ai rien dit, je me suis tu lâchement. Vendredi, j'ai perdu
80 euros pour une grève de merde et quatre jours plus tard malgré la présence d'un des principaux responsables de ce merdier, rien...Je l'ai laissé débiner son pipeau sur l'éducation à la citoyenneté, à la justice, au respect des règles et au vivre ensemble, etc, etc...

En sortant, j'ai vu une agence Société Générale enfoncée. Des bandits avaient jeté sur le distributeur en façade une Jeep qui était salement amochée et qu'un groupe de policiers écartaient du trottoir. C'était presque comique: on aurait dit que le 4x4 avait rebondi sur le distributeur qui n'avait (peut-être?) rien cédé...Tout s'est mis à tourbilloner. J'ai repensé au procureur adjoint de Bobig
ny expliquant qu'un quart des vols à main armée de sa juridiction sont l'oeuvre de mineurs, j'ai repensé à Jojo, à Pois Chiche, à la Teigne et à ce putain de recteur, agrégé et docteur en droit mais surtout spécialiste en pipeau sarkozyste.

Je me sentais vraiment mal. Le soleil déclinait, il faisait froid et sec et j'ai vu alors la grande sculpture de Pierre (Piotr?) Kowalsky un peu plus loin:

et j'ai soudain eu la certitude que je finirai empaler sur cette pointe terrifiante pour n'avoir pas dit la vérité au grand manitou, à cet adversaire, ce danger, ce grand bonimenteur sarkozyste. L'image des châtiments chez Bosch est devenu absolument incontournable pour venir sanctionner ma lâcheté.

Terrifié, j'ai regagné le RER en pensant à ce que je devrais faire pour éviter à mes élèves de devenir ou recteur de droite ou braqueur de banque...

Le prof

PS: j'apprend ce soir que 3 éléments des plus nocifs de notre classe de Terminale ont été définitivement exclus. Je ne m'en réjouis pas mais peut-être cela nous laisse-t-il une chance pour les autres?

lundi 28 janvier 2008

Un mot dans mon casier, a word in my box

Bonjour tout le monde.
Janvier tire à sa fin et je n'ai pas écrit depuis longtemps. J'avoue que le retour de vacances a été brutal...Le lycée a retrouvé sa routine, les élèves sont revenus dans les mêmes dispositions qu'avant Noel. Pour ma part, j'essaie d'être un brin plus organisé et rigoureux. Début janvier, les secondes devaient me rendre un devoir dans lequel ils devaient décrire un tableau de la Renaissance. Ceux qui ont compris s'en sont bien sortis d'autres ont trouvé le moyen de me parler du portrait de Louis XIV ou d'un tableau symboliste de la fin du XIXème siècle...ou de recopier l'article "Joconde" de Wikipedia. J'ai décidé en 2008 d'être intransigeant et draconien tant avec les étourdis, les plagieurs (ça se dit?) qu'avec les inattentifs.
Une élève, très timide en classe, avait oublié son devoir, j'ai donc mis un zero, le lendemain, elle a mis son devoir dans mon casier avec ce mot que je me permets de reproduire ici, in extenso:

"D'une part je me permet de clarifier un détail: j'ai fait mon devoir pendant les vacance mais je l'avais seulment oublier dans mon livre d'histoire. Merci de bien vouloir me croire.
Et d'autre part, dans votre élan de générosité de bien vouloir corriger mon devoir.
PS: Je dis la veriter "purement et simplement".
Je vous prie de bien vouloir accepter mes sin-
èrent salutations les plus distinge."

Hello everyone,
January is almost finished and I haven't written much. I have to say that coming back from vacation was brutal! Things are going well, kids are back pretty much in the same spirit they were before Christmas. Myself, I try to be a little bit more rigorous and organized. Earlier this month, the tenth graders were supposed to write me a short essay on their chosen Renaissance painting. They did reasonably well for those who understood what it was all about; one described a portrait of Louis XIV and had the guts to tell me she read on the web that it definitely was Renaissance even though it was done in the 1670s; another one just preferred to write about 19th century symbolism...I don't count a-not-very-bright-kid who thought he could just copy the whole "Joconde" article from wikipedia.org...as if the teacher had never heard of wikipedia...
In my box, in the teacher's room, I found a letter with the essay of a timid young 10th grader, it read like that (however, the original broken French with its mistakes and curious attempts to mimic polite formulas is hardly translatable) :

"Sir,
On the one hand I wish to clarify a detail: I did do my essay during vacation but I had only forgoten it in my history textbook. Please believe me.
On the other hand, as you are veri generous please grade my essay.
PS: I tell the trouth purly and simply.
Salutation."

lundi 17 décembre 2007

ça bosse! Work in Progress!


Remarquez ce que je suis obligé d'écrire au tableau pendant les interros: "Ne posez pas de questions bêtes, je ne donne PAS de réponses"

See what I have to write on the board (with chalk!) during tests: "Don't ask stupid questions, I do not give answers for the test!"

mardi 11 décembre 2007

bombe, menace et autre amusement/ Bomb, threat and other funny stuff

Bonsoir tout le monde!

De retour au lycée après un long week end...Le lundi a été difficile pour les collègues: quelqu'un a appelé le commissariat pour dire qu'il y avait une bombe au lycée! Résultat: évacuation mouvementé et attente à l'extérieur en attendant que le (seul) chien renifleur à 10 km à la ronde puisse passer la truffe dans l'ensemble du lycée !
Du coup ce matin pas cours, pour que les chers petits aient le temps de venir rechercher leurs précieuses affaires abandonnées dans la panique hier soir. Beaucoup de profs prédisent avec un mélange pervers de fatalisme et d'espoir l'enclenchement d'une longue série d'alertes à la bombe qui viendrait perturber les derniers cours avant Noël. D'autres remarquent qu'il est heureux que les chiens détecteurs de bombes ne soient pas les mêmes qui recherchent la drogue.

Pour ma part, j'essaie de rester concentré sur un paquet de copies particulièrement médiocres que m'ont rendu mes 1ère ES...C'est très difficile. Il n'y avait pourtant que quatre pauvres questions de cours à propos de l'Europe et de la construction européenne. Certains élèves n'ont rien compris et rien appris, mélangent tout et produisent un charabia épouvantable: quand je demande comment l'Union remédie aux inégalités entre les territoires (j'attendais une petite réponse de cours sur les fonds structurels) une élève me redonne l'histoire des bombardements de l'OTAN sur la Serbie et la paix de Dayton?!
L'après midi, à mon grand soulagement, la conseillère d'orientation est enfin là pour faire un exposé à mes animaux de Terminale S, ceux-la même dont le conseil a fourni matière à mon dernier billet. L'un d'eux, S m'agresse immédiatement: il est furieux parce que j'ai rapporté dans un rapport comment il avait longuement développé dans mon cours la thèse fumeuse et raciste selon laquelle les Indiens envahissent les cités et en chassent les Arabes, et qu'en plus "ils puent" S a beau être maghrébin, il est tout aussi capable de propos racistes. Comme il est surtout très bête, il pense qu'en me menaçant (sans que je comprenne très bien de quoi) je vais retirer le dit rapport...quand j'en rédige un autre..."Faites gaffe, M'sieur, Faites gaffe, dès que vous allez dire quelque chose..."
Aujourd'hui, il nous arrive d'être comparé à des policiers ou des gardiens de prison. Un élève de cette même classe m'a dit un jour "M'sieur de toute façon, vous, les profs, vous êtes comme la police, vous avez toujours raison". C'est lorsque l'on entend des propos aussi cons que l'on a vraiment envie de démissionner.

Ce n'est pas mon cas. J'ai décidé aujourd'hui d'être le coordinateur du projet "Sciences Po" qui vise à présenter nos meilleurs élèves pour que l'IEP en recrute un ou deux au nom de la "diversité". Il y aurait beaucoup à dire sur le programme lui même, mais j'essaie d'expliquer aux élèves que lorsqu'on vous présente une chance aussi sensationnelle (passer du 9-3 à Sciences Po) il faut tenter de la saisir. Dans cette Terminale si pénible, deux élèves sont discrètement venus me voir à la fin du cours pour me dire qu'ils voudraient participer au programme. ça a sauvé ma journée!



Good evening everyone!
Today I was back at the school after a nice and long weekend. Monday had been tough for everyone: someone called the police and told them a bomb was about to explode in the school! My colleagues had to abort all classes and go outside (in the street) with the kids for hours until the sole anti bomb dog in a 10 miles radius could sniff around all the school! This morning all classes had been canceled, so the dear little kids could come back and get their stuff they had abandoned in the panic. A lot of teachers predict, with a fatalistic tone and also some pervert enthusiasm, that this is only the beginning of a long series of fake alarms that would wreck the daily routine of the lycée until Christmas. Others underline the fact that it was a good point the antibomb dog is of a different sort than the antidrug one...

On my part, I'm trying to stay focus on my 11th graders essays and it ain't easy! This was a very basic 4-questions-in-an-hour-test about the lesson! We had just completed a long chapter about Europe and the birth and development of the European Union. I had explained the quandary of defining a "European identity", underlined the Turkish admission quagmire, also described the 2 main European policies "Common Agricultural Policy" and the "Structural Funds" which give Euros to underprivileged regions of the Union (in the Past in Spain or Ireland today mostly in Eastern Europe). But they didn't get it at all! One of the question asked was "How the Union tries to cure economic inequalities?" simply inviting the student to tell all what s/he had learned about the "Structural Funds" policy. One particularly lost student of mine told me NATO was used to that effect, i.e. when they bombed the asses of the Yougos back in 1995 to achieve the Dayton agreement...
After lunch, to my great despair I was due to meet again my terrible 12th graders. But some Deity had heard my complaint for the rare and fantomatic "Professional Adviser" woman -who has to work on 3 schools at the same time...being capable of this remarkable performance of advising and counseling some 4000 kids at the same time- did come to the class to tell what exactly they could do and how, yes, they could, one day, find an honest and legal way to sustain their living, buy Nike shoes and American baseball hat (with size labels on it, so it's really authentic!)...Some of my worst student did ask how to enter "classe prepa" which are classes that prepared students to Ivy League university...And it was no joke. But most seriously, S, a young (he is 20) Arab came to me pretty furious, with the clear intention of impressing like we were in the ghetto. S has a big mouth and is pretty dumb; but he thinks he knows stuff. Last week he did tell the class how the Indians were "invading" the housing project where he lives, and how "they stinks". In France, this is racist slur, and this is a misdemeanor. In a court of law, you could be fined and even jailed for expressing a racist point of view or denying the Holocaust. It's pretty unbelievable to English or American people, I know. So I had filled a "report" concerning S' terrible point of view which must have led the "Educational Advisor" (EA) to remind S how bad this was. S being pretty dumb, he thought that threatening me would lead me to cancel the report. He said "Be careful, Sir, be careful! If you say anything, I'm gonna, I'm gonna..." I'd never know what he exactly has in store for me: aggression? Gun? Dog? Knife? My car burned? Afterward I joked with the EA to whom I brought a 2nd report about the threat: if I were to be a victim of an agression by S...this was the jackpot! Official recommendation, media, news, Sarkozy, T.V?!

Anyway, sometime we got compare to "cops". One of those 12 graders, 20 years old told me once "You, the teachers, you're just like the cops, you're always right" Such statement do encourage people to quit their job.

But I didn't. On the opposite, today I volunteered to head the special project on "Sciences Po". "Sciences Po", a.k.a. "Institut d'Etudes Politiques de Paris" is a prestigious Parisian institution which can only be compared to an Ivy League institution like Harvard, Yale or Cambridge in England. However "Sciences Po" only deals with Humanities, Law and Politics. It's the school for high level Civil Servants, lawyers, judges, journalists, history researcher in politics, etc...Its director loves the U.S. and has decided to implement an affirmative action of his own. While most of the students admitted at "Sciences Po" are coming from heavily favored and white background, the director has signed a convention with schools like mine which would propose for direct admissions a bunch of gifted individuals even though they might not be straight As students. This sounds very normal in the U.S. but in France it's revolutionary! Before no one would ever ever dare to challenge the "meritocracy" of exams and tests...Anyway, I will help to train our best students to talk later with a jury of Sciences Po professors who might select 1 or 3 of them to go to their university.

At the end of the session with the 12th graders, once S and his threat was long gone, two kids, S another young Arab, but eager for knowledge, shy and discrete and C a white girl, came to tell me they would like to enter the program for "Sciences Po". This is the kind of thing that make people stick to their job!

vendredi 7 décembre 2007

Défoulement collectif, Collective Loss of Inhibition?!

Qui dit décembre dans notre chère profession dit bien sûr...conseil de classe.
Hier a eu lieu le dernier des trois classes dont je suis professeur. C'était, je dois l'avouer, celui que j'attendais avec le plus d'impatience vu comment ses membres me gonflent depuis le jour 1. Paradoxalement, il s'agit d'une classe de Terminale Scientifique qui devrait fonctionner en pilote automatique, focalisée sur le passage de l'examen. Mais on nous y mis une petite dizaine de redoublants de 18 à 20 ans qui nous pourrissent bien l'ambiance. Un seul exemple: récemment le délégué de classe à trois mètres de moi faisait des avions en papier qu'il envoyait ensuite vers ces collègues endormis du fond de la classe. Je lui dit "Eh Truc! Vous êtes vraiment affligeant!", l'élève interloqué: "Mais M'sieur, ça veut dire quoi 'affligeant'. Je l'ai viré, mais j'avoue que j'ai pas le courage de virer le tiers de la classe à chaque entame de cours. Donc climat pourri, ambiance nulle, résultats catastrophiques. Les profs ont tellement fait un tableau apocalyptique que la proviseur, parfois un peu molle, a décidé de préparer l'exclusion de six d'entre eux pour janvier...On va voir. Après tout l'école n'est obligatoire que jusqu'à 16 ans.
Vous allez dire que l'on renonce, et quelque part vous aurez raison, mais bon, est on éducateur social? Qu'est-ce que vous voulez faire face à des jeunes de 18 à 20 ans qui viennent en cours les mains dans les poches, refusent de prendre des notes et sont le plus souvent sous l'emprise de stupéfiants...Voilà une classe qui s'esclaffe quand j'ai prononcé pour la première fois le nom "Truman"...Donc pas trop de regrets par rapport à quelques individus de cette classe. Juste avant le conseil, ils ont en plus eu le bon goût de bien m'énerver pour me rappeler à quel point je pouvais pas les encadrer. La seule vraie tristesse qui me reste quand je pense à certains d'entre eux, c'est à quel point certains sont aigris et en colère contre l'école et le système en général; à quel point, ils vont se retrouver largués avec rien, si ce n'est des idées complètement connes sur à peu près tout...On sort de là et on retraverse la nuit, on se sent soulagé parce qu'on pense au reste de la classe qui pourra peut être étudier correctement après le départ de ces boulets, en même temps on comprend qu'on vient de fabriquer une nouvelle fournée d'exclus.

December in our system means "class council". I have to tell my English-speaking readers: I know nothing about the educational system either in the US or in the UK so I'll try to find the best equivalent or the best translations. I'll appreciate if you tell me which words I ought to use! Anyway, in France, every trimester, teachers, staff and representatives from students and parents meet to discuss the results and achievements of the students and to review all the marks given so far and give a general appreciation.
I teach history and geography to 3 classes of different levels which would correspond I guess to 10th, 11th and 12th grade. The one meeting that was held yesterday, was the one of the 12th graders, majoring in Science. Well, in France, this is supposed to be the elite class, because for decades the selection has been made not on French or History but with Maths and Science because the idea was and still is that Maths offer more chances to culturally deprived students to succeed. But this class sure was no elite, 10 of them were taking the class again for having failed their final exam, the famous "Baccalaureat" (a French speciality, to be described in details in a later post!). Those "ten terrible", if I can dub them like that, are between 18 and 20...while they should only be 17. Most of them don't study at all, despise us and are very angry with the system. One of them was crafting paper planes during a lesson of mine, I tell him he is "pathetic", he answered candidly "But sir, what does pathetic means?" I expelled him but I could not do that with all of them at every class. The outcome is easy to tell: the atmosphere is bad, the results terrible. The headmaster could not believe our tale of frustration, wrath and despair. She did surprise me by planning 6 meetings of the school council to deliberate about a possible expulsion for those trouble makers.
You could tell me that we cowardly renounce to our duty to educate everyone and you would be right. But are we supposed to work like social educators? I mean school in France is mandatory until 16, what are we supposed to do with guys aged 18 to 20 who come because of some legal or familial threats, with no materials no will to study, and most of the time after having smoked pot?! So I won't regret them if they are indeed expelled from the high school. I'd rather help the rest of the class who behave and want to succeed. However after the meeting, I could not help but thinking about those guys. I really resent their bitterness against school and "the system" in general. They're gonna go filled the army of job seekers from the ghetto with no formation, no self-esteem...

Le prof

On y retourne, Back to a Blog?!

Bonjour à toutes et tous,

J'ai décidé de me remettre à écrire un petit peu. Après tout, je vis des moments assez intenses, rigolos, tristes, intéressants, pathétiques...qui feraient des billets assez chouettes. 2 défis: écrire au moins une fois par semaines et écrire en bilingue. Egalement conserver un anonymat complet!

Hello Everyone,

I've decided to write again. After all, I go through some intense, funny, sad, interesting or pathetic moment...which could easily feed a blog. I have two challenges: to write at least on a weekly basis, and to write systematically in French and English. I also want to keep this blog absolutely anonymous!

Le prof, the teacher